Mickaël Brun-Arnaud, Mémoires de la forêt, Les souvenirs de Ferdinand Taupe, illustré par Sanoé,
L’école des Loisirs, 2022 (Prix Babelio – Jeunesse 2022)
C’est le premier roman d’un psychologue devenu libraire et écrivain pour la jeunesse.
Il s’agit d’une épopée dans le temps que les personnages remontent pour retrouver les traces d’une existence passée. Roman aux allures de fable puisque tous les personnages sont des animaux, il convie le lecteur à suivre Archibald Renard, libraire de la librairie de Bellécorce, dans une longue quête à travers la forêt avec son ami Ferdinand la taupe pour que ce dernier retrouve son épouse. Mais cette quête se révèle être une recherche du temps perdu d’autant plus que Ferdinand est atteint de la maladie de l’oublie-tout : « Malade de l’Oublie-tout, Ferdinand était devenu une sorte de voyageur temporel, voguant entre les époques comme on passe d’un chapitre à l’autre du grand livre de la vie. » Au fil du récit le lecteur revisitera le passé de ce personnage. Entre rêve et réalité, entre larmes du souvenir et joie des retrouvailles, la rétrospection permet à Ferdinand et à Archibald de mieux comprendre le temps passé et présent. C’est à une réflexion sur la mémoire et sa perception du temps humain que Mémoires de la forêt, Les souvenirs de Ferdinand Taupe invite le lecteur, jeune et moins jeune. Les traces d’une intertextualité assez explicite avec le roman médiéval (Les aventures de Maître Renard et son compère Ysengrin), le roman autobiographique (Mémoires d’outre-tombe) ainsi que l’appel au topos moliéresque de l’enfant retrouvé inscrivent pleinement ce texte romanesque dans une certaine tradition littéraire, tout en parlant d’une manière imagée de la maladie d’Alzheimer. Le lien entre l’expression de la douleur et le souvenir révèle dans la fiction le caractère thérapeutique et réparateur de l’écriture qui choisit de faire effraction dans le passé.
« Comment ne pas avoir peur lorsque les portes du souvenir se ferment et que ceux qu’on aime restent coincés derrière ? ». Le roman met en place une pensée du temps, qui est selon l’un des personnages « une chose bien relative ».
Faouzia Righi.