
Auteur : Antonio Ferrara
Editions : Bayard jeunesse
Parution : décembre 2020
Roman – à partir de 12 ans
144 pages
Biographie de l’auteur :
« Antonio Ferrara vit à Novare. Il a travaillé sept ans dans un centre d’accueil pour mineurs, où il s’est intéressé à la psychologie du développement et à l’écriture comme outil pour raconter le mal-être. Il anime des ateliers d’écriture créative et certains de ses textes ont été représentés par des troupes de théâtre. Il a écrit de nombreux romans pour la jeunesse. »
Résumé de l’éditeur :
« Tonino suit la voie que son père a tracée pour lui. Celle des seigneurs, pour qui les codes d’honneur sont une question de vie ou de mort. Chaque soir, il descend sur la place. Adossé au mur, il attend les clients qui viennent lui acheter ses petits sachets. La drogue, c’est une histoire de famille. À treize ans, Tonino n’a peur de rien. Sa vie lui convient telle qu’elle est. Remplie d’adrénaline. De toute façon, il n’a pas le choix. Dans certains quartiers de Naples, le rêve n’est pas une option. Pourtant, quand la loi du silence se brise, la nuit laisse aussi parfois entrevoir une lueur d’espoir. »
Antonio Ferrara dresse dans ce roman le portrait d’un grand nombre d’enfants et d’adolescents de la jeunesse napolitaine tout en dénonçant les agissements des adultes dont ils sont à la charge. Ce livre a été écrit pour eux, comme un hommage à ces jeunes dealer de Naples, en s’inspirant de ce qui se passe dans le quartier de la Scampia contrôlé par la mafia italienne, la Camorra. Il est aussi dédié à Giancarlo Siani, un jeune journaliste italien assassiné par les mafieux pour ses idées et le combat qu’il menait contre eux.
Sont abordés ici, à travers le personnage de Tonino, avec à la fois une froideur distanciée et une réserve, une sensibilité timide, les dérives auxquelles certains jeunes doivent faire face parce qu’ils sont issus d’un milieu très dur, où les adultes décident pour eux et déterminent leur avenir. À 13 ans seulement, Tonino passe ses nuits, revolver en poche, à dealer pour le compte de son père. Comme son cousin et ses jeunes sœurs, il est au service des adultes. Il doit lutter pour se faire une place parmi eux, prouver sa valeur sans compter la dureté dont ils font preuve. Il baigne dans la violence, le danger et la mort.
Le roman est écrit à la première personne, ce discours direct rend les propos du héros encore plus frappants. Il raconte son quotidien à travers des chapitres très courts, qui s’enchaînent comme les jours, sans que le jeune garçon ait vraiment de prise sur eux, presque à la manière du journal intime. Ce format rend la lecture facile et fluide, d’autant plus qu’il s’exprime dans un langage abordable qui parle aux jeunes. La rigidité qui l’enferme transparaît à travers ses phrases courtes, directes, qui font penser à ces adultes trop occupés qui n’ont pas le temps pour s’amuser. L’auteur nous montre qu’il cache des fragilités, une impuissance qu’il ne devrait pas avoir à se reprocher. Il doit se montrer fort pour plaire et pour survivre.
C’est aussi parce que le personnage est poussé par les adultes à grandir trop vite qu’il développe une maturité et des réflexions qui l’amènent à se poser des questions sur leurs intentions, sur le bien fondé de leur organisation, sur la légitimité de ses propres désirs et libertés. Tonino est un personnage très intéressant car très complexe : tout au long du roman se livre en lui une bataille, celle de sa volonté et de ses rêves d’adolescent qui se heurtent sans cesse à la dictature des adultes qui brisent ses élans, le font douter voire renoncer. Sous ses airs de dur, il n’est rien d’autre qu’un enfant qui ne demande qu’à profiter encore un peu de l’insouciance de cet âge.
Des personnages sont présents dans son entourage, qui l’aident à explorer d’autres voies, comme son grand-père avec lequel il noue une relation tardive et qui, à travers sa tendresse, vient alimenter ses réflexions en l’amenant à se questionner sur l’importance des choses qui font la vie ; ou son professeur d’Italien, une figure d’inspiration pour Tonino, qui va lui montrer, avec beaucoup d’humour, qu’il peut être considéré. Les adultes peuvent aussi être bienveillants et participer à le révéler à lui-même.
C’est un roman qui aborde un sujet peu connu de la jeunesse et des adultes, qui montre, d’une part, que la liberté n’est pas acquise pour tous les enfants et, d’autre part, l’importance du lien social et comment les adultes ont un devoir de protection envers eux.
Sarah KAOU
Thèmes : famille, liberté, mafia, adolescence, enfance, école, éducation, confiance, amitié